Bien servi à Aubervilliers, Luigi ! De fait, et à la façon d’un grand cru, le Pirandello 2018 de Marie-José Malis se pose en pièce maîtresse dans la programmation de La Commune avec Vêtir ceux qui sont nus à la mi-mars.
« En un sens, vous voyez arriver une sorte de proposition sournoise qui serait de monter un Pirandello par an, histoire que ce soit bien clair que ce soit un très, très grand auteur », expliquait avec humour la directrice du théâtre en juin dernier.

Pourquoi tant d’amour ?

Les habitués des lieux se souviendront, en effet, que Marie-José Malis s’était attelée,
par deux fois déjà, à mettre en scène l’auteur sicilien avec La Volupté de l’Honneur
en 2015, pour récidiver avec On ne sait comment en 2016. Pourquoi tantd’amour ?
« Pirandello est maltraité en France, expliquait alors Marie-José Malis. Cette méconnaissance vient sans doute d’une erreur d’interprétation. On met Pirandello
du côté de la psychologie, là où à mon sens il faut aller du côté de la philosophie. »
Le texte de Vêtir ceux qui sont nus (Vestire gli ignudi, titre original) a paru en 1922
avant de devenir un des grands classiques du théâtre italien contemporain : « C’est
une pièce absolument géniale qui, avec le personnage d’Ersilia Drei, met en scène le
personnage de l’exclue, la jeune femme qui vit dans la rue, résume la metteuse en
scène. Tout le monde essaie de la prendre en charge mais on s’aperçoit que ce qu’elle
a à nous dire n’intéresse personne ! La charge réelle de sa souffrance n’est entendue
par personne. Tout le monde vient parasiter ce réel de ses propres fantasmes,
de ses propres utilités. »
Voilà, cette grande pièce de Pirandello sur l’inconsistance triomphe à Rome dès les
premières représentations.
L’homme a alors 55 ans et il s’éteindra en 1936 avec, entre autres dernières volontés : « Quand je serai mort, qu’on ne m’habille pas. Qu’on m’enveloppe nu, dans un linceul. Pas de fleurs sur le lit, pas de cierges ardents. »
On croit savoir que pour Vêtir ceux qui sont nus, la salle sera repeinte en blanc,
que le plateau sera un grand espace vide et blanc. Pirandello en cause posthume...

Eric Guignet

VÊTIR CEUX QUI SONT NUS

Du 14 au 25 mars
Théâtre La Commune
2 rue Edouard Poisson
Tél. : 01.48.33.16.16