Contenu
Ce commerce ne paie plus
Les marchands de sommeil dans le viseur de la municipalité et la justice.
Il y a quelque chose qui relèverait des Thénardier chez les époux Haque, si l’on appliquait la trame des Misérables à l’univers de la plus vile spéculation immobilière.
Et de fait, le tribunal de Bobigny a condamné ce couple de marchands de sommeil à une peine de 18 et 12 mois de prison ferme, assortie d’une confiscation – ce qui est assez singulier en pareilles occurrences – de l’un des deux pavillons dans
lesquels se réalisait leur commerce.
Condamnés à indemniser les victimes
Ces deux-là ont, dans la foulée, été condamnés à indemniser l’une des victimes au titre de son préjudice moral et la Ville d’Aubervilliers au titre de son préjudice d’image
et matériel. C’était le 28 mars dernier et, entre temps, les Haque ont interjeté appel :
« Grand bien leur fasse, ils vont certainement prendre encore plus cher ! », martèle
Soizig Nédélec, maire-adjointe à l’Habitat.
De son côté, Mériem Derkaoui, la maire, s’était initialement félicitée de la peine prononcée, « une lourde condamnation qui sonne comme une concrétisation des actions de lutte contre l’habitat indigne menée ces dernières années avec les services d’Hygiène et de santé, du Logement et de l’habitat, de l’Urbanisme et des Affaires juridiques de la Ville d’Aubervilliers. »
Trois ans. Trente-six mois d’opiniâtreté des services que mentionne Mériem Derkaoui…
Au 19 de la rue Verlaine, l’un des deux pavillons indignes avait dès 2015 fait l’objet
d’une condamnation sans conséquence pour nos logeurs propriétaires en outre
d’un second pavillon au 14-16 de cette même rue et d’appartements au Pré Saint-
Gervais.
Ça va pour eux, franchement moins pour les divers et nombreux locataires
logés de la cave jusqu’aux combles dans de véritables taudis. Soit l’exploitation d’une population fragile, parce que le plus souvent en situation irrégulière, originaire
du Bangladesh comme les deux époux : « Ils n’ont jamais tenu compte de nos injonctions. Pourtant, si les procédures sont très longues, le gros travail réalisé par la direction des Affaires juridiques, du Domaine et de l’Administration générale et tous les autres services a fini par payer », rappelle Stéphane Fernandes, inspecteur
de salubrité au service d’Hygiène de la Ville.
Concordance des temps, le plan départemental de lutte contre l’habitat indigne vient d’être lancé et « Aubervilliers a été plusieurs fois citée en exemple.
Voilà pour montrer la voie à d’autres communes également touchées par ce fléau », souligne Soizig Nédélec. Le signal est fort pour les marchands de sommeil : ici l’exploitation de la misère ne paie plus.
Eric Guignet